Page:Machaut - Œuvres, éd. Hœpffner, I.djvu/29

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
INTRODUCTION XXI


largement rémunérateur. Les auteurs de l’époque ne savent assez vanter sa « largesse », autrement dit sa folle prodigalité, qui l’a rendu presque légendaire. Machaut lui-même, avec quelque exagération sans doute, nous fait savoir qu’il lui est arrivé plus de cinquante fois de distribuer, au nom de son maître, en un seul jour quelque 200,000 livres[1]. Il a bien dû bénéficier, lui aussi, de cette pluie d’or. La preuve s’en pourrait peut-être trouver dans ce fait qu’en 1333 Jean de Machaut, frère cadet de Guillaume, est également aumônier du roi ; c’est probablement Guillaume qui l’avait engagé à venir auprès de lui[2].

En 1337, Machaut obtient enfin son canonicat à Reims ; il prend possession de sa charge par procuration ; il était sans doute encore retenu au loin par son service auprès du roi de Bohême[3]. On a admis que le

  1. Confort d’ami, vv. 2930 ss.
  2. Le 4 janvier 1333, le pape accorde, en même temps qu’à Guillaume, un bénéfice ecclésiastique « Johanni de Machaudio, clerico diocesis Remensis a, également sur la demande du roi Jean qui l’appelle « dilectum familiarem et domesticum elemosinarium suum » (A. Thomas, Romania, X, 329). N’étant alors que simple clerc sans bénéfice, Jean devait être le cadet de Guillaume, comme le suppose M. A. Thomas (l. c.).
  3. Dans le Livre rouge du chapitre de Reims, qui donne la liste des prébendes et des chanoines, dressée depuis le commencement du xive siècle (Archives de Reims, cartulaire A), on trouve au f° 54 r°, d’une écriture du temps, la mention suivante : « Nunc Guillermus de Machaudio ; receptus fuit per procurationem anno domini 1337, feria quarta post Conversionem sancti Pauli. » Cette notice a été reproduite par le chanoine de Reims, Jean Herman Weyen (mort vers 1732), dans un recueil manuscrit de notices sur les archevêques et les dignitaires du chapitre d« Reims, sur les chanoines et sur les diverses prébendes dont ils étaient titulaires (Bibl. de Reims, n° 1773). L’ouvrage fait avec soin d’après les sources originales est digne de confiance, mais non exempt d’erreurs. Weyen donne, par exemple, feria 5 au lieu de feria quarta. C’est ainsi que Tarbc a reproduit cette notice (l. c., p. ix). Weyen ajoute que Guillaume « legitur jam receptus 1331 et 1335 in praebendis. » Je suppose qu’il s’agit là des expectatives de prébendes accordées au poète par les papes Jean XXII et Benoît XII, dont Weyen a eu connaissance ; au lieu de 1331 il faut lire 1333. — Nous devons la plupart de ces renseignements ainsi que quelques-uns de ceux qui suivront à l’obligeance de M. L. Demaison ; nous tenons à lui en exprimer ici tous nos remerciements.