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daient dans la nuit des temps. J’ai cédé à un autre la marche de l’église de S. Francisco. Et je déjeune maintenant avec régularité.

Ceci dit, je vous demande la permission d’aller, un de ces jours, vous lire un travail, fruit de longues études, un nouveau système de philosophie, qui, non seulement explique et décrit l’origine et la fin des choses, mais qui encore passe de beaucoup Zénon et Sénèque, dont le stoïcisme n’est que bagatelle auprès de ma recette morale. Car mon système est prodigieux : il rectifie l’esprit humain, supprime la douleur, donne le bonheur, et couvre de gloire notre cher pays. Je l’appelle Humanitisme, de Humanitas, commencement des choses. Ma première intention révélait une excessive infatuation : je voulais l’appeler Borbisme, de Borba, dénomination aussi vaniteuse que rude à l’oreille. Et d’ailleurs, elle disait moins. Vous verrez, mon cher Braz Cubas, vous verrez que c’est véritablement un monument. Et si quelque chose peut me faire oublier les tristesses de la vie, c’est d’avoir enfin trouvé la vérité et le bonheur. Les voici donc dans la main de l’homme, ces deux fugitives ! après tant et tant de siècles de luttes, de recherches, de découvertes, de systèmes et de désillusions, les voici dans la main de l’homme. À bientôt, donc, mon cher Braz Bons souvenirs du vieil ami,

Joaquim Borba dos Santos.

Je lus cette lettre, sans la bien comprendre. Elle était accompagnée d’un écrin contenant,