Page:Machado de Assis - Mémoires posthumes de Bras Cubas.djvu/309

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— À rien, lui répondis-je ; j’ai sommeil et je vais dormir.

Elle me contempla quelques instants en silence :

— Je sais bien ce qu’il te faudrait, me dit-elle. Tu as besoin de te marier. Laisse-moi faire, je vais te trouver une jeune fille qui fasse ton affaire…

Je sortis de là, triste et désorienté. Tout en moi était prêt au voyage : l’esprit et le cœur. Et voilà que surgit devant moi le portier des convenances qui se refuse à me laisser embarquer sans que j’exhibe mon passage. J’envoyai au diable les convenances, et avec elles la constitution, le corps législatif, le ministère, tout enfin.

Le lendemain, j’ouvre un journal politique et j’y lis que, par décrets du 13, Lobo Neves et moi avions été nommés, respectivement, président et secrétaire pour la province de ***. J’envoyai immédiatement un mot à Virgilia, et deux heures après, j’allai me rencontrer avec elle à la Gamboa. Pauvre Dona Placida ! elle était chaque fois plus triste. Elle me demanda si nous oublierions notre vieille amie, si la pro-