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groupe dans les rangs des féroces plantigrades, tua six ours de l’avant-garde au milieu de leurs compagnons.

Le froid, après une recrudescence si cruelle, fit enfin quelques rémittences, et le 28 mars, le mercure, brusquement dégelé, remonta, sans arrêt, de 10 degrés. Le lendemain, 29, une violente tempête du sud, qui remplit les échos du craquement de la glace, et des lugubres plaintes des icebergs, fit naître de nouveau l’espoir d’une débâcle prochaine. Elle éloigna les ours pour quelques heures.

Le 31, on put juger des effets de la tourmente. L’Étoile Polaire, s’abaissant sur son ber, en avait écarté les armatures d’acier au point de peser de tout son poids sur la couche tendue au-dessous de sa quille. Une crevasse profonde se traçait devant son étrave.

On put entrevoir la délivrance.

Mais les bêtes affamées reparurent. On en compta quarante, et la surveillance devint plus attentive que jamais. Il était facile de conjecturer que les fauves, aiguillonnés par la nécessité, ne tarderait pas à faire une nouvelle tentative contre le steamer.

Elle eut lieu en effet dès le surlendemain, et l’attaque fut si complète, si unanime, qu’après avoir abattu à coups de fusil et de canon-revolver une dizaine des assaillants, les marins durent, une fois encore, battre en retraite, et se replier dans l’intérieur du navire.

Dans l’intervalle, on avait été contraint de jeter par-dessus bord le cadavre de Schnecker. Le traître n’avait pas même eu les honneurs de la sépulture, et les ours avaient dévoré ses restes malheureux. Aussi bien, malgré l’horreur de cette scène, personne n’avait-il plaint outre mesure ce criminel frappé au