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de franchir sans trop d’efforts les 20 milles qui séparaient l’île Courbet des terres du Nord.

Hélas ! il fallut promptement renoncer à cette espérance. Dès le troisième mille, un accident se produisit. La glace, sous l’action des marées encore très fortes, ne s’était pas agglutinée. Elle se rompit sous le poids de l’un des traîneaux, et Guerbraz faillit être englouti dans la crevasse. Sa vigueur et son adresse le tirèrent de ce mauvais pas. On n’eut pas même à déplorer la perle d’un seul objet.

Mais, un kilomètre plus loin, le même accident se reproduisit, avec ce désagrément considérable que les courroies d’attelage de deux des chiens se rompirent et que l’un des animaux disparut sous la glace. En même temps, des bruits de mauvais augure manifestèrent une désagrégation presque complète de l’icefield. On dut battre en retraite, à travers d’incroyables dangers, et l’on mit six heures à refaire les sept kilomètres déjà parcourus.

Pendant tout le trajet, Mlle de Kéralio avait fait preuve d’une intrépidité admirable. L’obligation de la retraite l’abattit un peu, et elle versa quelques larmes, mais sans se plaindre toute-fois de la décision que la plus élémentaire prudence imposait à Hubert d’Ermont, commandant de la colonne.

On dut attendre trois jours encore au campement. Mais, le 10 août, après une nuit pendant laquelle le mercure était descendu à 23 degrés, on jugea le pack suffisamment aggloméré pour reprendre la tentative de sortie.

Cette fois, elle fut couronnée de succès.

Il y avait maintenant quatre semaines que M. de Kéralio et ses deux compagnons étaient partis, emmenant avec eux le sous-marin. On ne pouvait espérer retrouver leurs traces avant