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DE SAÏRD À DJÉZIREH

l’horizon, noyée dans le soleil, et se confondant avec le ciel dont elle a les reflets, une mer bleue : c’est le désert ; à nos pieds, la dernière portion de notre formidable descente ; puis, raccordant le désert aux sauvages défilés du Tigre, les premières assises de montagnes se perdant au loin en longues ondulations.

Au bout de notre descente se trouve une grande grotte, sinon creusée, à tout le moins remaniée de main d’homme ; le sentier contourne plusieurs vallons, où la végétation de montagne se fait déjà plus rare. À un tournant du chemin nous ne pouvons retenir un cri d’admiration ! Dans un vallon abrité des vents, le sentier se faufile presque invisible à travers d’épais buissons de lauriers-roses ; un ruisseau limpide s’y glisse en cascatelles étincelantes au soleil ; une arche de pont ruinée se cache dans le petit bois ; charme poétique, avant-goût du midi, délicieuse surprise !

Le caractère de la végétation change complètement ; le laurier abonde dans les fonds, mais la montagne se dénude.

Bientôt le sentier rejoint les bords du Tigre, qui, n’étant plus enserré dans ses défilés, coule paresseusement. Nous demandons à notre vieux zabtié la distance de Djézireh. Iki boutchouk saat : Deux heures et demie, dit-il. Deux heures et demie, c’est dans ces pays une réponse invariable qu’il faut interpréter par : « Je ne sais pas. »

Une heure plus tard, un homme répond à la même question en indiquant quatre heures de marche. Un Kurde seul nous donne une réponse raisonnable : « Je n’ai pas de montre, dit-il, comment voulez-vous que je vous indique une distance en heures » ?

Finnik est pittoresquement situé sur les bords du Tigre dans un terroir d’une fertilité admirable ; des ruines assez considérables semblent indiquer qu’il y eût ici autrefois une ville ; Ainsworth croit pouvoir identifier ces ruines avec celles de l’ancienne Phœnica mentionnée par Ammien Marcellin[1].

  1. Ainsworth, ii, 348. Ritter, Erdk. xi, 122, se range à l’avis d’Ainsworth.