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CHAPITRE XVIII

de la ville que par une étroite langue de terre. Ce rocher porte la forteresse, aujourd’hui une ruine délabrée. Dominé de tous côtés par les montagnes, ce château serait une triste défense contre l’artillerie ; mais protégé par son torrent et par l’escarpement de ses abords, il devait être un redoutable obstacle dans le « bon vieux temps ».

Xénophon y passe avec ses Dix mille ; mais, si j’ai bonne souvenance, il ne mentionne pas de forteresse à Bitlis. La légende en attribue la fondation à Alexandre ; elle nomme même celui de ses lieutenants qui en eut la garde[1] (? ?).

Ce château est le point central de la ville. Un peu en amont et sur la rive droite du Bitlis-Tchaï débouche un vallon aux pentes assez douces[2]. Les habitations y sont disséminées dans des jardins ; c’est comme un faubourg de Bitlis ; mais la vraie ville se groupe autour du château et en aval, surplombant le précipice, escaladant les pentes rocheuses, offrant partout à l’œil des ruelles en casse-cou, des perspectives invraisemblables, des fouillis de maisons échafaudées les unes sur les autres.

Restant encore sur la rive droite du Bitlis-Tchaï, nous débutons par escalader un promontoire rocheux qui domine toute la ville ; il porte l’ancien palais des Begs kurdes, transformé aujourd’hui en konak, en préfecture si vous voulez[3]. Le Vali y demeure et c’est à lui que nous voulons faire notre première visite pour lui remettre nos lettres et éviter ainsi toute difficulté. Le Tabour-Agassi nous introduit.

Le Vali est un personnage d’une cinquantaine d’années ; il ne parle pas français, mais heureusement nous trouvons chez lui un Levantin, ingénieur des ponts et chaussées à Bitlis, M. X…, qui veut bien nous servir d’interprète. La visite fut des plus cordiales

  1. Barb, d’après le 4e livre de Schéref, Phil. hist. Classe der Kais. Ak. der Wiss. Wien, Heft von Juli 1839, 4.
  2. On voit très distinctement ce vallon sur la vue de Bitlis.
  3. Ainsworth donne comme altitude du Konak 5 470′ d’après ses observations barométriques ; 5 000′ à l’hypsomètre ; moyenne 5 235′ = 1 595m environ. (Ainsworth, ii, 372.)