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CHAPITRE XV

ses maisons se groupent autour d’un rocher escarpé qui forme comme leur centre. Le rocher est couronné d’une misérable chapelle dédiée au Saint-Sauveur. Ce sanctuaire, pauvre d’ornements, car trop de brigands veillent aux alentours, est riche de souvenirs plus humbles de la piété des fidèles ; les pèlerins ont depuis plusieurs générations gravé leurs noms sur la chaux des murs. Les noms les plus anciens sont presque une confession de foi ; les plus récents ne sont trop souvent que le souvenir de vulgaires pique-niques — car les parties de plaisir commencent à être en vogue à Van.

Du haut du rocher la vue est admirable ; ce soir elle était pleine de contrastes. Au Sud les montagnes perdaient leurs sommets dans des nuages sombres qui donnaient au lac une teinte bleu-vert, foncée et métallique, d’aspect sinistre. Au Nord, au contraire, le ciel clair de ce bleu pâle des soirs d’automne, le lac à la fois gai et majestueux, formaient cadre au Sipan-Dagh dont le sommet émergeait d’une légère couronne de nuages.

À Van nous nous débattions alors encore au milieu de nos difficultés : aussi ai-je contemplé avec délices ce spectacle dont la beauté reposait de la vilenie des hommes !

Au retour nous faisons un petit détour par Shahbaghy (vigne, jardin du Shah), village situé au pied des collines de Toprak-Kaleh, mais du côté nord. Si j’ai bonne souvenance, la tradition donne ce village comme quartier général de Shah-Abbas lorsqu’il assiégeait Van, d’où lui serait venu le nom de « jardin du Shah » ?

Pauvre forteresse de Van ! Vues de Lesk, les murailles qui la défendent au Nord, font bonne figure ; mais le jour où une batterie russe s’installera sur les hauteurs qui couronnent ce village, elles tomberont à la première décharge !


7 Novembre.

Excursion au Varak.

Notre but est le couvent des Sept-Églises (Yedi-Kilissa), situé à deux heures et demie environ de Van. Bien qu’il y ait plusieurs