Page:Müller-Simonis - Du Caucase au Golfe Persique.pdf/162

Cette page a été validée par deux contributeurs.
118
CHAPITRE VIII

menace ruine ; personne ne s’en sert et l’on passe la rivière à gué ! Nos gens nous assomment d’histoires de brigands, tellement que, pour en finir, nous glissons en grande pompe des balles dans nos fusils ; cela semble les rassurer un peu. Un individu de Dilmân, nous voyant passer, se met sous notre protection ; il prétend avoir été dévalisé, il y a quinze jours. Nous marchons ainsi jusque vers une heure dans une plaine ondulée, sans caractère vers l’Est, mais limitée à l’Ouest par les montagnes qui forment la frontière entre la Turquie et la Perse.

Le sentier longe alors la base de tout un régime de monticules presque exclusivement composés de sel gemme. À notre grand étonnement, sur le flanc sud du monticule le plus élevé, sourd une petite source d’eau parfaitement douce. Nous y faisons halte pour casser la croûte, tandis que les chevaux de charge continuent leur route. Tout à coup M. Nathanaël, apercevant de loin deux cavaliers, pris d’inquiétude, pique des deux, nous laissant le soin d’accompagner le cheval aux provisions. Serghis, monté sur cette bête, veut franchir un petit ruisseau bourbeux où avait passé M. Nathanaël ; mais son cheval, assez pesamment chargé, enfonce jusqu’au poitrail ; le voilà couché dans le bourbier, et avec lui toute notre literie, dans quel état ! Il nous faut travailler dans cette boue infecte pour recharger la bête et nous ne rattrapons le bagage qu’une grande heure plus tard, au pied des collines.

Leur montée, réputée dangereuse, mène au faîte de partage des eaux du bassin de l’Araxe et du bassin fermé d’Ourmiah ; de brigands point.

À partir de ce faîte, les collines s’abaissent en longues ondulations jusqu’à la plaine de Salmas ; mais un orage nous cache les détails du paysage. M. Nathanaël a subitement disparu ; un berger musulman que nous rencontrons ne peut nous donner aucun renseignement sur lui ; il est d’ailleurs fort grossier et refuse même de nous vendre un peu de lait.

À la nuit tombante nous débouchons enfin dans la plaine de