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MONSIEUR AUGUSTE

mable… il porte votre nom ; il m’écoute en ce moment, avec une impatience distraite. Peu après, ce jeune nomme se dépeignit à moi comme le plus malheureux des êtres de la création. Il voulait aller vivre aux pays où on ne vit pas. Je crus deviner le motif de ce désespoir, et je le mis sur le compte d’un amour rebuté ou d’une timidité absurde. La démarche que je fis alors me fut dictée par mon cœur, avant la réflexion… Je donnai la joie à un père, qui vous aimait déjà comme un fils, et il faut maintenant que cette joie qui a peut-être passé dans l’âme d’une jeune fille, se change en deuil domestique… Avez-vous quelque chose de consolant à me répondre, monsieur ?

Octave baissa la tête et traça des lignes sur le parquet avec la pointe de son stick.

— Mais enfin, monsieur, poursuivit Mme de Gérenty, vous n’avez au cœur aucun amour parisien, aucune intrigue de ville, puisque vous venez vivre à la campagne ; vous êtes indépendant, vous êtes riche, vous êtes à l’âge heureux des douces passions. J’admets que jusqu’à présent vous n’avez pas songé à épouser Mlle Louise ; mais qui vous empêche d’accepter un mariage de proposition, qui, la veille des noces, deviendrait un mariage d’amour ; une dot de cinq cent mille francs n’est pas aussi à dédaigner,