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J. J. AMPÈRE.

politesse, qui donnait un charme particulier à sa conversation. Dans nos discussions littéraires, il s’exprimait souvent avec un feu qui laissait voir toute la sincérité de ses opinions, mais son ardeur ne tendait qu’à nous persuader de ce qu’il croyait juste et vrai ; jamais il ne se proposa la gloire de briller dans le débat. Bon et candide, parfois il se prenait à douter de lui-même, et si la réflexion lui présentait quelque motif d’incertitude, il s’empressait de fournir des armes à ses adversaires déjà convaincus. Personne ne mit plus de zèle et d’impartialité dans l’examen des ouvrages envoyés aux concours que propose et que juge l’Académie. M. Guiraud s’attachait, avec une scrupuleuse exactitude, à découvrir, dans toutes les compositions, les traces du talent et de l’originalité. Il se plaisait à relever les traits heureux ; les fautes l’affligeaient, même d’un auteur inconnu. Sa paternelle bienveillance pour les jeunes littérateurs contrastait avec son goût épuré. Si le juge était indulgent, le poëte était sévère. Il fut, pour tout dire en un mot, selon l’expression de Racine, il fut « un très-bon académicien. » Il aimait notre compagnie autant qu’il en était aimé ; et nous avons le regret de penser que sa mort fut hâtée peut-être par le désir qu’il eut de se trou-