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PORTRAITS HISTORIQUES ET LITTÉRAIRES.

puni de mort. Une femme appartenant à une famille considérée de Besançon, madame d’Olivet, était accusée d’avoir envoyé à son mari, réfugié en Suisse,… son portrait. Elle allait comparaître devant le redoutable tribunal, lorsque M. de Chantrans supplia son jeune ami d’intercéder auprès de son père en faveur de l’accusée. Charles jura de la sauver, et tint parole. Une seule pièce existait qui prouvait la correspondance avec le proscrit, et cette pièce était entre les mains du président. Les prières, les larmes de l’enfant, ses menaces mêmes, car il voulait se tuer si madame d’Olivet était condamnée, émurent un homme naturellement humain. Il souffrit que son fils détruisît en sa présence la lettre fatale ; et cette fois sa faiblesse ne put lui coûter un remords.

Peu de temps après, une de ces lois révolutionnaires que le bon sens ne réprouve pas moins que l’humanité, vint atteindre M. de Chantrans lui-même. Banni de Besançon par un décret qui interdisait aux nobles la résidence des places de guerre, il gémissait d’abandonner son élève sans guide dans un pareil moment. Heureusement M. Nodier père, comprenant la nécessité d’arracher son fils aux hideux spectacles qui l’entouraient, eut le