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faisante. Est-ce parce que vous avez l’air moins effarouché ? Cependant, la dernière fois, vous me faisiez penser à un oiseau qu’on vient de mettre en cage.

Vous m’avez vu trois mines, je ne vous en connais que deux. L’effarouchement est une sorte de dépit radieux que je n’ai vu qu’à vous. Vous m’accusez à tort d’être mondain ; depuis quinze jours, je ne suis sorti qu’une fois le soir pour faire une visite à mon ministre. J’ai trouvé toutes les femmes en deuil, plusieurs avec des mantilles ; non, des barbes noires qui les font ressembler à des Espagnoles ; cela m’a paru fort joli. Je suis d’une tristesse et d’une maussaderie étranges. Je voudrais bien vous chercher querelle, mais je ne sais sur quoi. Vous devriez m’écrire des choses très-aimables et très-senties, je tâcherais de me figurer votre mine en les écrivant, et cela me consolerait.

Mon roman vous amuse-t-il ? Lisez la fin du deuxième volume : M. Yellowplush. — C’est une assez bonne charge, à ce qu’il me semble. Adieu, écrivez-moi bientôt.

Je rouvre ma lettre pour vous prier de remarquer que le temps a l’air de se rasséréner.