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viendrait beaucoup mieux. Je hais les surprises qu’on m’annonce, parce que je me les représente beaucoup plus belles qu’elles ne sont en effet. Croyez-moi, revoyons le Musée ensemble ; si je vous ennuie, tout sera dit, je ne vous y reprendrai plus ; sinon, qui empêche que nous nous voyions de temps en temps ? À moins que vous ne me donniez quelque raison intelligible, je persisterai à croire ce qui vous irrite tant. — Je vous aurais répondu tout de suite, mais j’avais perdu votre lettre et je voulais la relire. J’ai bouleversé ma table, je l’ai rangée, ce qui n’est pas une petite affaire ; enfin, après avoir brûlé quelques rames de vieux papiers destinés à ramasser la poussière sur mon bureau, j’ai cru que votre lettre s’était anéantie par quelque sortilège. Je l’ai retrouvée tout à l’heure dans mon Xénophon, où elle était entrée, je ne sais comment ; je l’ai relue avec admiration. Il faut assurément que vous n’ayez guère de cette vénération dont vous me parlez quelquefois, pour me dire tant de sinrazones ; mais je vous les pardonnerai si nous nous voyons bientôt ; car, lorsque vous parlez, vous êtes bien plus aimable que lorsque vous écrivez.