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société où tout tend, au contraire, à rendre l’existence de chacun plus douce et plus supportable. Nous reprendrons alors nos discussions sur l’hypocrisie, et il est possible que nous nous entendions.

J’ai passé presque tout mon hiver à étudier la mythologie dans de vieux bouquins latins et grecs. Cela m’a extrêmement amusé, et, s’il vous vient jamais en tête l’envie de connaître l’histoire des pensées des hommes, ce qui est bien plus intéressant que celle de leurs actions, adressez-vous à moi et je vous indiquerai trois ou quatre livres à lire, qui vous rendront aussi savante que moi, ce qui n’est pas peu dire ! À quoi passez-vous votre temps ? je me demande cela quelque fois sans pouvoir trouver une réponse raisonnable. Si j’avais à tirer votre horoscope, je prédirais que vous finirez par faire un livre : c’est la conséquence inévitable de la vie que vous menez et que les femmes mènent en France. D’abord de l’imagination et quelquefois du cœur ; puis, de l’hypocrisie, on passe à la dévotion, puis on se fait auteur. À Dieu ne plaise que vous en veniez jamais là !

J’espère voir madame de X… à Paris cette an-