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relève ? Il faut dépenser toute son énergie à se soustraire au mal.

« Sa parole était saccadée. Il parlait comme un coureur à bout de souffle.

« — Oui, je suis ici, mais c’est régulier. Pour ma première évasion, je n’ai rien eu. Pour ma seconde, au lieu de trois ans, on ne m’a donné que deux ans. Je peux dire que l’on me châtie avec bonté. Il me reste encore trois cents jours de cachot sur les bras. Je sais que, s’il y a moyen, je ne les ferai pas jusqu’au bout. Il ne faut pas dire que l’on ne rencontre pas de pitié ici. C’est la goutte d’eau dans l’enfer. Mais cette goutte d’eau, j’ai appris à la savourer. Aucun espoir n’est en vue, et je ne suis pourtant pas désespéré. Je travaille. J’ai été écrasé parce que j’étais de la bande à Bonnot et cela sans justice. J’ai trouvé plus de justice dans l’accomplissement du châtiment que dans l’arrêt.

« Je suis seul sur la terre. J’avais un enfant. Il ne m’écrit plus. Il m’a perdu sur son chemin, lui aussi.

« Il pleura comme un homme.

« — Merci, dit-il. Ce fut une grande distraction.

« Et comme on repoussait la porte, il dit d’une voix secrète qui venait de l’âme :

« — Le bagne est épouvantable. »