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haillonneux. Les hommes, remontés brusquement à la bestialité des premiers âges, s’entre-tuaient pour pouvoir vivre.

Ce fut à cet instant, alors que les bipèdes civilisés se couchaient dans l’animalité la plus dégradante, que les armées allemandes s’ébranlèrent à travers la Belgique et la Suisse. L’Allemagne, qui suivait avec une âpre curiosité les événements se déroulant hors de ses frontières, n’était pas loin de considérer la France comme une nation en pleine déliquescence, trempée dans toutes les abjections, finie et condamnée, présentant de plus un danger permanent pour la sécurité et le progrès humains. L’occasion était trop bonne pour rater la revanche, depuis si longtemps convoitée, sur la défaite de la grande guerre mondiale au cours de laquelle le militarisme prussien avait mordu la poussière, sans profit réel, d’ailleurs, pour le monde civilisé, puisque les armées peinturlurées de tricolore ou de rouge renaissaient un peu partout. Aussi l’invasion fut-elle rapide et décisive. Les avions ennemis survolèrent Paris, versant la mort. Le Gouvernement révolutionnaire en appela à la nation, trompeta le devoir sacré de la « défense prolétarienne », édifia sur les places publiques des autels analogues à ceux de la grande Révolution bourgeoise. Mais rares furent ceux qui répondirent à ces appels suprêmes. Les jeunes gens se dérobèrent, prétextant que c’étaient toujours eux qui faisaient les frais de la casse, cependant que les vieux, promis au pourrissoir, échappaient à tous dangers. Les travailleurs affirmèrent qu’ils n’avaient pas d’ennemis parmi les autres travailleurs, de l’autre côté des fron-