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Mon père demeura inflexible. Plus pressant, M. Thomson ajoutait :

— Un conseil… Allez donc voir Clemenceau. Les choses peuvent parfaitement s’arranger.

À quoi mon père, intraitable, répliquait :

— Si Clemenceau a quelque chose à me dire, qu’il vienne me voir lui-même. Il sait où me rencontrer.

Il y eut d’autres démarches. Je venais de récolter, ainsi que je l’ai dit, une année de prison. Bah ! pour peu que mon père le voulût, cette affaire serait réglée. Jamais je n’entrerais à la Santé. C’était là prendre un homme par son faible. Mon père, un soir, me chuchota :

— C’est très embêtant… Voilà, maintenant, que c’est toi qui vas trinquer pour moi.

Le sacrifice d’Abraham ! Je le rassurai, en riant.

— Tu peux y aller. D’abord, si j’évite la prison, cette fois, je n’y couperai pas la prochaine. Je suis disposé à continuer de plus fort en plus fort.

Et la cause fut entendue. La bagarre commença. Mon père se rendit dans le Var, sonnant le ralliement des forces républicaines, dénonçant la malfaisance du ministre-renégat, traître à la République. C’était le joyeux temps où Maurice Allard, au Congrès socialiste de Toulouse, répliquait à J.‑L. Breton qui lui reprochait, pour se défendre, de pactiser avec les radicaux du Var :

— Ce n’est pas la même chose. Moi, j’ai le droit de faire alliance avec tous les honnêtes gens. Je combats un MALFAITEUR PUBLIC.

Malfaiteur public ! Le mot devait demeurer comme