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là, outre Hervé et moi-même, Almereyda, Merle, et le gérant Marchal, un brave travailleur du Bâtiment, barbu et ingénu. À chaque repas, le « Général », levant son verre, commençait ainsi :

— Je bois… t’au lait !

Après quelques minutes, il reprenait :

— Je bois… t’aux lettres !

Enfin, il achevait :

— Je bois… t’en fer blanc !

Et il s’esclaffait.

C’étaient à peu près les seules plaisanteries qu’il risquait. Il n’en connaissait pas d’autres. Mais le plus curieux, c’était l’horreur que ce polémiste plein de truculence manifestait pour toute trivialité de langage. Quand on osait devant lui un de ces mots colorés et décisifs qui disent si bien ce qu’ils veulent dire, Hervé fronçait les sourcils. Peu à peu, cependant, il s’accoutuma à en entendre de vertes et de pas mûres. Un jour même, il s’oublia jusqu’à lâcher le mot de Cambronne.

Ce jour-là Almereyda s’exclama :

— Eh ! eh ! le général se dessale.

*
* *

Gustave Hervé n’avait ni besoin ni passion. Un peu de gourmandise, seulement. Il aimait la bonne chère. Et, en qualité de fils adoptif de la Bourgogne, ce Breton prétendait s’y connaître mieux que quiconque, en vins.

C’était là son péché mignon : un bon petit repas