Page:Méric - À travers la jungle politique littéraire, 1930.djvu/194

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

après il montait à la tribune pour me flétrir et m’outrager, comme dirait le poète Auguste Barbier. Pauvre vieux !

*
* *

Cette dernière période électorale, je puis vous l’assurer, manqua souvent de gaieté. Les communistes me suivaient à la piste. Partout où j’étais annoncé comme orateur, ils surgissaient en bandes, hurlant, terrorisant les salles, entourant l’estrade, mettant le bureau en fuite… Je demeurais seul, les bras croisés sur la poitrine, m’efforçant de crâner, de tenir tête à la meute. Au fond, je dois l’avouer, je n’étais pas rassuré du tout. Et je songeais : « Il suffit qu’une de ces brutes risque un geste de violence et tout est dit… je n’en sortirai pas. »

J’ai lu, ces jours derniers, que Léon Blum avait été quelque peu malmené dans ses réunions du XXe par les hordes déchaînées du communisme stalinien. Qu’aurait-il dit s’il s’était trouvé à ma place ? Cela se passait dans le XIIIe arrondissement, rue du Moulin-des-Prés. Imaginez une longue salle rectangulaire avec un semblant de tribune au fond. Les communistes, armés de gourdins et de couteaux, entouraient cette fragile estrade où je me trouvais seul, tout ce qu’il y a de plus seul. Je voyais leurs mufles crispés de haine, leurs bras tendus rageusement vers moi. Je sentais leur haleine sur mon visage. Dans le tas, il y avait des « volontaires » de la zone, hommes et femmes mêlés, reconnaissables, les uns