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pièce tirée de son roman : Biribi. Ce fut le succès. Mais le caractère de Darien le conduisit promptement à se brouiller avec ses collaborateurs et interprètes. La pièce disparut de l’affiche.

Je ne devais retrouver les traces de Darien qu’après la grande catastrophe mondiale. Un jour, je découvris sa signature dans un quotidien — je crois que c’était Le Rappel. L’écrivain y développait une sorte de socialisme agrarien. Il était féru des théories d’Henry George qu’il voulait acclimater en France.

Puis, plus rien. Un soir, au Journal du Peuple, Georges Pioch me prit à part :

— Avez-vous connu Darien ?

— L’auteur de Biribi ? Comme écrivain, beaucoup ; comme homme, un peu.

— Voilà, il vient de m’écrire. Il me demande d’aller le voir.

— Pourquoi pas ?

Quelques jours après, comme j’interrogeais Pioch, il me dit :

— J’ai vu Darien. Ah ! le pauvre homme ! J’ai vu un être brisé, fini, désespérant de tout. Il n’a même plus la force ni le désir de travailler.

Malheureux Darien ! Il devait finir ainsi. Sa mort, quelques semaines après, passa inaperçue. Son nom et ses œuvres étaient ignorées des jeunes, et parmi les hommes de son temps, ses polémiques sanglantes ne lui avaient guère valu que des adversaires.

Il s’en alla dans l’indifférence. J’ai essayé, plus tard, de le ressusciter en faisant publier Biribi et Bas les Cœurs ! dans un journal du soir. L’homme a pu avoir