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il y parvint et n’est séparé de nous que par elle. Le premier des « docteurs de l’Eglise » — car en vérité Soloviev est un grand docteur de l’Eglise, si ce n’est présente, tout au moins future — il a pressenti que tout le christianisme n’est que le chemin vers une future religion de la Trinité. La révélation de la Trinité qui est devenue dans le christianisme un dogme mort, Soloviev le premier depuis le temps des conciles œcuméniques, essaya d’en faire une révélation vivante, la synthèse du Verbe Humain et Divin, du Verbe qui s’est fait Chair — synthèse qui doit être comme la voûte immense d’un nouveau temple de Sainte Sophie, Sagesse de Dieu.

Dostoiewski mourut la veille du 1er mars, Soloviev la veille de la révolution russe, tous deux avec le même pressentiment terrible. La fin du monde arrive, l'Antéchrist arrive, ces mots que le maître avait dits avant de mourir, l’élève les répéta dans son œuvre la plus grande : L’histoire de l'Antéchrist. Mais ni l’un ni l’autre ne comprit que l’Antéchrist était plus près d’eux qu’ils ne le pensaient, que l’autocratie orthodoxe, cette fausse théocratie, contre laquelle ils luttèrent l’un et l’autre de tout leur élément inconscient et qu’ils n’eurent pas la force de vaincre avec leur conscience religieuse — est un des grands chemins de l’histoire universelle vers le Royaume de la Bête.