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l’on serait disposé à regarder comme les plus anciens ; cette apparence d’ancienneté ne serait-elle pas au contraire le résultat du contact de cette roche ? En Corse, je n’ai rien vu d’assez naturellement divisé par de brusques différences pour établir, entre ces terrains talqueux et calcaires des coupures, analogues à celles que M. Paretto a établies pour les terrains des environs de Gênes ; et il m’a paru probable que le calcaire à nummulites se liait au calcaire grenu, comme à Gênes le calcaire du bord de la mer se lie au calcaire à fucoïdes des montagnes qui dominent la ville. En Corse, sur toutes les lignes que j’ai suivies, j’ai toujours rencontré des masses serpentineuses, et les roches que j’ai observées présentaient toutes plus ou moins les caractères des masses cristallines, tandis que les vestiges des substances organiques y avaient disparu.

La grande chaîne de Sardaigne, qui reprend la même direction que celle de la partie orientale de la Corse, après une interruption formée par des rides transversales entièrement granitiques, paraît reprendre aussi le même caractère géognostique. Je n’en connais qu’une très petite partie ; mais, d’après ce qu’en rapporte M. de la Marmora, qui l’a entièrement visitée, et qui se propose d’en publier une description complète, elle est presque exclusivement composée de couches de calcaires, de schistes et de grauwackes, inclinées suivant les pentes, et déchirées seulement en quelques sommités par des terrains granitiques.


Les terrains tertiaires ne se trouvent nulle part dans l’intérieur de l’île ; ils ne se montrent que sur le littoral par lambeaux isolés et fort peu étendus. Trois dépôts, appartenant fort distinctement à cette formation, paraissent un peu hors des eaux de la Méditerranée, aux deux extrémités de l’île et dans le milieu de la côte orientale ; mais leurs connexions sous-marines étant encore inconnues, ils se présentent comme entièrement détachés les uns des autres.

Le fond du golfe de Saint-Florent, compris entre les extrémités des deux rides longitudinales que j’ai désignées sous le nom de Serra de Tenda et de chaîne du cap Corse, est occupé par une formation calcaire qui le borde en amphithéâtre, mais en se relevant surtout du côté du cap Corse, et en formant seulement une légère ceinture au bas des rochers de la Serra de Tenda. Les couches descendent en pente assez raide vers le golfe, et la tranquillité de ses eaux, profondes de 5 à 6 mètres seulement, fait que les falaises sont très restreintes et très peu prononcées ; mais du côté de la chaîne du cap Corse, les collines présentent un escarpement vertical très nettement dessiné, qui détermine un fossé profond qui les sépare du terrain plus ancien. Cette espèce de cirque est crevassée en plusieurs points par des fentes étroites et taillées à pic qui donnent passage aux eaux des torrens ; ces vallées occupées par une brillante végétation de lauriers en fleurs ; ces pentes couvertes de myrtes et d’oliviers sauvages ; ces rochers escarpés, garnis de grottes spacieuses, où les troupeaux et leurs pasteurs viennent chercher abri ; cette nature, tout à la fois élégante et sauvage, rappelle ce que