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Au cap Corse, la serpentine se montre au travers d’une formation très régulière composée de couches alternatives de calcaires grisâtres, de schistes talqueux très abondans, et de gneiss talqueux en général peu nettement caractérisés. Dans le centre de la chaîne, entre Corte et Cervione, on la rencontre, associée avec des euphotides, dans des terrains de schistes et de grès quarzeux ; elle est le plus souvent pénétrée de diallage métalloïde, et renferme fréquemment de l’asbeste et de l’amiante.

Le terrain arénacé occupe une étendue fort considérable, car il paraît se suivre sans interruption depuis l’Alluraja, au-dessus de Corte, jusqu’aux montagnes de l’Asinao ; c’est une sorte de grauwacke de couleur grise, et de texture serrée, qui souvent renferme une grande quantité de cailloux de quarz blanc, et prend quelquefois un grain plus grossier et une physionomie analogue à celle des grès du terrain houiller et des terrains secondaires. En plusieurs points les couches de grès deviennent très fissiles, et alternent avec des schistes, tantôt friables, tantôt compactes, tantôt ardoisés. Lorsque l’on coupe la chaîne en se dirigeant de Corte à Cervione, on voit distinctement les liaisons qui existent entre les grès, les calcaires et les schistes talqueux, et il ne me paraît pas possible de les séparer. Quant aux serpentines, elles interviennent à plusieurs reprises au milieu de cette formation, mais d’une manière toujours fort brusque et fort désordonnée.

Vers la limite méridionale de la formation, au-dessus de Porto-Vecchio, les serpentines disparaissent, les couches reposent directement sur le granite, et un changement extrêmement remarquable dans l’aspect minéralogique des roches se produit presque aussitôt. Les grès deviennent moins compactes et moins solides ; les schistes avec lesquels ils alternent prennent un caractère beaucoup plus semblable à celui des schistes secondaires ; et enfin, dans les hauteurs de l’Asinao, que je n’ai point visitées, M. Gueymard a vu, à ce qu’il paraît, ces mêmes grès de Sari et du Fiumorbo se lier à des calcaires chargés de nummulites. Ce géologue a pensé devoir établir une différence d’âge entre ce lambeau de terrain et la masse de la chaîne orientale ; cependant la formation de grès, qui s’étend d’une manière continue du sud au nord me semble se rattacher entièrement, d’une part, aux calcaires grenus et saccaroïdes et aux schistes talqueux, et, de l’autre, aux calcaires à nummulites. Ne serait-il pas possible que l’action inégale des serpentines eût seule causé la grande différence qu’on observe entre les roches qui sont dans leur voisinage immédiat et celles qui en sont plus éloignées ? La composition minéralogique des terrains liés à la serpentine offre une similitude remarquable avec celle des terrains qui entourent le golfe de Gênes. Je n’ai point eu le temps d’étudier avec assez de soin le sol de la Ligurie, pour émettre, à son sujet, une opinion bien précise ; mais il me semble que, dans ce pays comme en Corse, il serait bien singulier que les serpentines eussent toujours affecté de sortir au milieu des terrains que, suivant l’ancienne géologie,