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dont elles portent les indices, il n’y aurait rien d’invraisemblable à supposer que l’affaissement du sol et la grande cavité ouverte sur le trajet du Rhône ont coïncidé avec l’exhaussement des roches glauconiennes ou presque tertiaires des montagnes du Valais et de la vallée de l’Arve, à Fiz, et aux Diahlerets.

J’ai cru apercevoir la confirmation de la théorie de Dolomieu dans plusieurs sites des Pyrénées, où l’on a supposé trop légèrement que le phénomène des blocs erratiques ne se rencontrait point.

Les blocs de granite porphyroïde abondent dans le dépôt de comblement de la vallée d’Oueil, près de Bagnères-de-Luchon.

Ce dépôt, enfermé entre deux bordures schisteuses, est séparé de l’arête centrale du port d’Oo, où est le gîte de ces roches culminantes, par le bassin de l’Arboust, creusé aussi dans les schistes. Il faut donc nécessairement, ou que ce bassin intermédiaire ait été comblé de débris jusqu’au faîte, pour que de nouvelles émissions aient pu les répandre dans la vallée d’Oueil, ou que leur charroi se soit opéré avant l’excavation de l’Arboust. On rencontre le même phénomène dans la vallée de Gouroum, creusée aussi dans les schistes, sur l’autre rive du torrent qui descend du port d’Oo à Bagnières-de-Luchon.

Dans le vaste bassin de la Barousse, tout entouré de montagnes schisteuses et calcaires, le sol est partout jonché de cailloux et de grands blocs granitiques, qui, n’ayant pu y venir à reculons par l’ouverture du bassin, ont dû nécessairement franchir les hautes bordures qui séparent cette cavité annulaire des terrains granitiques.

On revoit ce phénomène dans les derniers gradins de la chaîne ou des torrens, tels que la rise du Mas-Dazil et le contiron de Mirepoix, dont le cours est entièrement circonscrit dans la zone calcaire inférieure, traversant néanmoins des bassins pavés de gros cailloux granitiques, dont un seul ne pourrait y arriver aujourd’hui en descendant du lieu de son origine.

Tous ces phénomènes offrent les indices d’une longue série de mouvemens convulsifs qui ont changé, à plusieurs reprises, la forme des contrées montagneuses, en déplaçant leurs masses et leurs inégalités. Ces contrées n’ont acquis définitivement leur forme actuelle que par la cessation de ces grands bouleversemens.

Le creusement de la Baltique, celui du canal de la Manche, et ceux des cavités lacustres que traversent le Rhône et l’Aar dérivent de causes analogues, mais ont pu appartenir à des temps différens.

Les dates des excavations du bassin Léman et de celui de l’Aar paraissent devoir être fixées à une époque avancée de la période tertiaire, puisque les blocs des roches primaires qui ont franchi l’espace occupé par ces vallées, reposent sur les molasses et les pséphites de cette période.

L’excavation de la Manche se serait, au contraire, opérée dans les siècles qui joignent la période secondaire à la tertiaire, puisque l’Angleterre est censée