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connues, et en m’aidant de quelques essais, je suis arrivé à des résultats très incomplets sans doute, mais qui m’ont paru intéressans.

Élaborés dans les mêmes creusets souterrains, épanchés autour des mêmes cheminées volcaniques, les trachytes, les phonolites, les basaltes sont composés essentiellement des mêmes élémens, silice, alumine, oxide de fer, soude et potasse, auxquels viennent s’adjoindre parfois la chaux, la magnésie, l’oxide de manganèse. La silice joue le rôle d’acide par rapport à tous les autres élémens. Dans des combinaisons où l’acide est toujours le même, il est évident que les variations de propriétés physiques doivent être principalement attribuées aux bases ; et comme ces bases diffèrent beaucoup de propriétés, les roches sont différentes. L’alumine et le peroxide de fer étant isomorphes d’une part, et le protoxyde de fer, le protoxyde de manganèse, la chaux et la magnésie de l’autre, on conçoit comment ces bases ont dû souvent se remplacer dans l’immense bain des matières en fusion, et par suite comment les matières sont venues au jour sous des aspects si divers quoique parties du même foyer. En général l’alumine et la magnésie tendaient à les rendre plus réfractaires, les protoxydes de fer et de manganèse plus fusibles, les alcalis plus vitreuses. Mais il ne faut pas perdre de vue que les silicates, infusibles par eux-mêmes, se fondent aisément quand ils sont combinés deux à deux, trois à trois. De plus, la fusibilité dépend beaucoup de l’état de saturation de l’acide. Ainsi les silicates et les bisilicates sont bien plus fusibles que ceux qui contiennent plus ou moins de silice. Les roches du Cantal nous offrent des exemples de ces différences. La géologie nous a montré les phonolites amoncelés à l’état pâteux, et les trachytes gris-noir étendus en nappe, grâce à une fluidité plus grande. Les alcalis se trouvent dans les deux roches à peu près en même quantité. Mais la première doit sa coloration en gris-verdâtre à une médiocre proportion de sesquisilicate ferreux ; les secondes sont colorées en gris-noir par une proportion notable de silicate ferreux. Or, cette dernière combinaison est plus fusible que l’autre ; c’est elle que certaines opérations sidérurgiques rejettent en abondance sous forme de scories grises métalloïdes. Ainsi les trachytes noirs ont dû être plus fusibles que les phonolites, ont pu s’étendre en nappes.

Je pense qu’il faut revenir de cette opinion émise dans les meilleurs ouvrages de géologie, que la coloration des roches est un phénomène sans importance. On croit avoir tout dit quand on a prononcé que les roches étaient diversement colorées par le fer. Cependant il est évident que la couleur dépend du mode de combinaison des élémens entre eux. On manque de recherches exactes pour établir d’une manière positive les relations de ces deux phénomènes. Toutefois c’est surtout de la présence du fer qu’ils semblent dépendre, aussi bien que la plus ou moins grande fluidité des roches. Il est tout-à-fait remarquable que cette dernière propriété paraisse tenir bien plus à la proportion du protoxyde de fer qu’à celle des alcalis. En effet, les trachytes anciens et les phonolites contiennent