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les uns avec les autres et parcourent les masses dans tous les sens. Dans les environs de Raifoun, les bancs étant à peu près horizontaux, se trouvent sur une grande surface exposés à l’air. Alors il semble que des parties de la masse ont plutôt cédé que d’autres à l’action destructive du temps et des élémens, et l’on ne voit plus pour ainsi dire que les jalons des étages supérieurs de la formation ; ce sont des rochers à formes très étranges, semblables à des colonnes ou à des piliers irréguliers, composées de plusieurs assises superposées. Les lignes qui séparent les assises sont alors les seuls indices de la disposition primitive en couches régulières. La surface de ces masses est sillonnée par des rainures nombreuses, et qui souvent, ayant quelque régularité, donnent aux roches l’apparence de colonnes cannelées. Rien n’est plus extraordinaire que l’aspect de cette forêt de piliers entre lesquels on est forcé de faire mille détours pour arriver au point que l’on a en vue. Dans ce calcaire on trouve assez fréquemment des coquilles fort grosses, et qui, toutes sans exception, ont le caractère singulier d’être écrasées ; elles paraissent l’avoir été lorsqu’elles étaient déjà pétrifiées. On y voit aussi des madrépores.

Avant d’aller plus loin, je vais résumer ce que je viens d’exposer. Je distingue les terrains dont je viens de parler en trois parties, comme le montre la fig. 1re, pl. XÏI.

1° En allant du haut en bas (géologiquement parlant), un terrain marno-calcaire composé de plusieurs alternatives de calcaire dur, mêlé de nodules et de lits de silex et de calcaires marneux blanc fissiles[1].

2° Un terrain sableux, composé de plusieurs couches de grès ferrugineux auquel prélude un terrain de calcaire jaunâtre plus ou moins mêlé de silice ou de sable, et dont quelques couches contiennent beaucoup de coquilles[2].

3° Un second terrain calcaire, composé de grands bancs de calcaire caverneux, dont les couches supérieures contiennent de gros blocs de silex et des lits de la même matière. Les assises inférieures n’en contiennent pas, et ne sont remarquables que par les trous et les canaux irréguliers qui les traversent[3].

Comme la pente de la montagne, les couches des deux premiers terrains sont fortement inclinées, souvent même verticales. Celles du troisième terrain, d’abord fortement inclinées, deviennent peu à peu horizontales.

Dans les deux voyages que j’ai faits au sommet du Sannine, je me suis assuré que les couches étaient ou horizontales ou disposées en sens contraire de celles du bord de la mer, en sorte qu’en allant de haut en bas je descendais sur les têtes des couches, ce qui me permettait de prendre avec ordre une suite d’échantillons. C’est ce que j’ai cherché à faire, et je vais en exposer le résultat, en faisant toutefois remarquer qu’il peut y avoir des lacunes, car, par suite de la disposition du terrain, je n’ai pas toujours distingué clairement les couches, et je n’ai voulu prendre que celles de la disposition desquelles j’étais certain.

  1. Terrain crétacé inférieur.
  2. Grès vert.
  3. Calcaire jurassique supérieur.