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dire que même par ce caractère elle correspond à l’espèce à laquelle nous l’avons rapportée. La fig. 10 de la pl. XI ressemble si parfaitement à une jeune feuille de châtaignier, qui n’a pas encore acquis tout son développement, qu’elle ne s’en rapprocherait pas davantage si elle avait été dessinée d’après la plante vivante. J’aime à voir, à propos de cette plante fossile, la géologie venir au secours de l’histoire, et fournir des documens précieux pour les âges primitifs du globe. Les plantes qui sont à présent communes dans l’économie domestique, comme les citronniers, la vigne, l’olivier, le cerisier, le jujubier, le figuier, ont été à différentes époques, plus ou moins éloignées, introduites des régions étrangères dans le midi de l’Europe, et l’histoire et la mythologie ont conservé la mémoire de l’introduction de quelques unes d’entre elles. Aucune de ces espèces, j’oserais l’assurer, n’a été encore trouvée fossile dans les terrains tertiaires de nos pays. Dans ces âges reculés, le châtaignier couvrait, comme il couvre encore à présent, le dos de l’Apennin, au-dessous de la zone du hêtre, et suffisait à fournir avec ses fruits la subsistance à l’espèce humaine qui à une époque très reculée est venue s’établir dans ces pays. J’appellerais volontiers du nom d’aborigènes ces espèces, qu’on peut dire natives des endroits qu’elles ont toujours habités, comme on a donné ce nom aux peuples qui ont été les premiers habitans de ces pays. Parmi ces plantes, je marque le Quercus æsculus pour l’Italie méridionale, où il vit encore, et où nous savons qu’il a fourni la nourriture aux anciens habitans du pays. On peut en dire autant du Quercus ballota pour la partie plus méridionale d’Europe. Il ne serait pas étonnant qu’on trouvât des traces fossiles de ces deux plantes dans les terrains tertiaires des pays où elles vivent encore.

La découverte des feuilles de châtaignier nous aidera pour la détermination de la feuille dessinée à la fig. 12, pl. XI, quoique la mutilation de la base, qui manque, présente une espèce de problème à double solution. Voici les rapprochemens que peut suggérer chacun des deux cas, les seuls que la direction des nervures et la partie qui reste de cette feuille permette d’admettre. Si le pourtour de la feuille, pour arriver au pétiole, se restreint en forme de cône, alors elle doit être rapportée au fagus sylvestres, et pour moi je penche vers cette opinion, parce que le hêtre comme le châtaignier continuent encore à couvrir les montagnes auxquelles s’appuient les collines de la Stradella. Si au contraire le pourtour de la feuille vers la base remontait vers le pétiole et formait une légère échancrure, nous aurions alors la plus exacte représentation de l’Alnus cordifolium, espèce particulière à l’Italie méridionale et à la Corse

La feuille de la fig. 2, pl. X, reste incertaine, à cause du manque de caractères génériques ; de toute manière, pour ne pas passer sous silence les rapprochemens que sa forme ou d’autres raisons présentent à l’imagination, il est possible qu’elle appartienne à une espèce de peuplier assez voisin du Populus græca. Plusieurs espèces de ce genre croissent encore en abondance dans ces