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MORT DU DUC D’ORLÉANS

cherchions à faire notre devoir, à nous distinguer, s’il se pouvait ; mais pas une idée d’intérêt, d’ambition, même de gloire personnelle ne pouvait approcher de nous ; tout lui était rapporté. Maintenant où sera notre centre commun ? Ce ne peut être ce pauvre enfant dont la direction deviendra peut-être une pierre d’achoppement entre nous ! »

Il est certain que, malgré l’union qui a toujours régné parmi les frères, ils ont des instincts, des goûts, des avis différents ; mais tous déféraient à monsieur le duc d’Orléans.

Tendre, amical, fraternel avec eux jusqu’à la camaraderie la plus intime, il avait pourtant établi son autorité de chef de famille de façon à les préparer à reconnaître en lui leur roi et à recevoir ses ordres avec soumission.

Il n’ignorait pas combien cet entourage de quatre princes, tous distingués par leurs qualités morales, leur belle tournure, leur brillante et valeureuse jeunesse, donnerait de lustre à son trône, et eux comprenaient toute l’importance de former un faisceau bien uni dans les circonstances données.

Peut-être la force de la nécessité maintiendra-t-elle cette union. Mais le lien principal est irrévocablement rompu ; car on ne peut se dissimuler que l’aîné des quatre princes restants est loin d’avoir sur les autres la supériorité que tous se plaisaient à reconnaître dans monsieur le duc d’Orléans, et ne saurait prétendre à exercer la même autorité.

Il arriva enfin ce triste jour du départ de Chartres, si déploré par la Reine et si souhaité par tous les entours.

Le Roi et la Reine avaient passé la nuit dans la chapelle. Madame la duchesse d’Orléans y arriva à six heures et, bientôt après, les autres princes et princesses. Le clergé récitait les prières des morts.