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EXPÉDITION DE LA DUCHESSE DE BERRY

toutes les troupes se rangeraient sous les ordres du vainqueur d’Alger dès qu’elles sauraient sa présence.

Aucune défection n’avait lieu cependant et, partout où l’on en venait aux mains, les militaires détruisaient les bandes insurgées. Toutefois la conflagration s’accroissait et s’étendait ; le gouvernement se décida à mettre les provinces de l’Ouest sous le régime exceptionnel de l’état de siège.

Cette mesure ne souleva aucune opposition. Fort peu de gens, au fond, désiraient la guerre civile, et l’on reconnaissait généralement dans cette décision, l’intention qu’avait le cabinet de donner à madame la duchesse de Berry un nouvel avertissement de s’éloigner et à ses partisans de rentrer dans la tranquillité qu’on était fort disposé a leur laisser.

Toutefois, un parti plus jeune, et partant plus énergique, se disposait de son côté à profiter, lui aussi, des embarras du gouvernement. Il s’était en quelque sorte compté le jour des obsèques de monsieur Casimir Perier, et il fit explosion lors de celles du général Lamarque, un des députés marquant de l’opposition.

L’émeute, dans cette circonstance, se grandit jusqu’à l’insurrection, et l’on put craindre le triomphe de l’anarchie.

Le Roi, prévenu, sur les huit heures du soir, à Saint-Cloud, des inquiétudes du cabinet, après avoir lu les dépêches des ministres et causé un instant avec le baron Pasquier, président de la Chambre des pairs, qui confirma la gravité des faits, demanda ses voitures.

La Reine, entourée des princesses et de ses dames, travaillait, selon son usage, à sa table ronde. Le Roi se plaça derrière sa chaise.

« Amélie, dit-il tout haut du ton le plus calme, il y a du bruit à Paris, je m’y rends, veux-tu venir ?