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EXPÉDITION DE LA DUCHESSE DE BERRY

s’établit quelque peu de temps à Édimbourg, puis s’éloigna sous prétexte de santé.

Elle fit un assez long séjour à Bath. On manda qu’elle y était accouchée d’une fille ; la suite rend tout croyable. Dans le moment, je n’y vis qu’une calomnie de l’esprit de parti dont je fus indignée.

Les registres des aubergistes, répétés par les gazettes, nous apprirent que madame la duchesse de Berry avait traversé l’Europe pour se rendre à Naples où elle n’était aucunement désirée. Il n’y avait guère moyen toutefois de repousser absolument une sœur réclamant asile. On accepta donc une visite en refusant l’établissement.

Ce point fixé, elle fut bien accueillie. Elle se montra d’autant moins exigeante dans cette transaction qu’elle était, dès lors, sous l’influence de ses espérances et en pleine intrigue pour leur exécution. Ses entours ne doutaient pas plus qu’elle de leur succès.

La princesse fit l’acquisition de deux bateaux à vapeur, destinés à parcourir la Méditerranée à l’effet d’entretenir et de faciliter les intelligences qu’elle pensait avoir en France.

L’un des deux lui échappa. L’autre, avec plus ou moins de complicité du gouvernement piémontais, arbora le pavillon sarde en restant à ses ordres, et devint ce Carlo Alberto qui a joué un rôle principal dans les événements que je vais m’appliquer à retracer sous l’aspect où ils me sont apparus.

Je dirai ce qui est à ma connaissance, d’après des témoignages authentiques, et, parfois, je hasarderai des conjectures en les signalant comme telles. Sans doute cette relation différera, en bien des points, de celles fournies par les partisans de la princesse, et il y aura nécessairement des lacunes que ses complices seuls pourraient remplir.