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gnage d’un autre écrivain ; et dans les affaires il était toujours le premier à chercher des excuses pour ceux qui le contrariaient. Un homme d’esprit a dit de lui qu’il ne savait pas trouver de tort à un autre, et cela était vrai même de ses ennemis ou de ses détracteurs.

Buffon était du nombre des auteurs que de bonne heure on lui avait laissé lire : il le portait avec lui dans ses promenades ; c’était au milieu du plus beau pays du monde, sur les bords de cette vallée si féconde de la Garonne, en face de ses collines si riches, de cette vue que les cimes des Pyrénées terminent si majestueusement, qu’il se pénétrait des tableaux éloquents de ce grand écrivain ; sa passion pour les beautés de la nature naquit donc en même temps que son admiration pour le grand peintre à qui il devait d’en avoir plus vivement éprouvé les jouissances, et ces deux sentiments demeurèrent toujours unis dans son ame. Il prit Buffon pour maître et pour modèle ; il le lut et le relut au point de le savoir par cœur, et dans la suite il en porta l’imitation jusqu’à calquer la coupe et la disposition générale de ses écrits sur celle de l’Histoire naturelle.

Cependant les circonstances avaient encore éveillé en lui un autre goût qui ne convenait pas moins à une imagination jeune et méridionale : celui de la musique. Son père, son précepteur, presque tous ses parents étaient musiciens ; ils se réunissaient souvent pour exécuter des concerts. Le jeune Lacépède les écoutait avec un plaisir inexprimable, et bientôt la musique devint pour lui une seconde langue, qu’il écrivit et qu’il parla avec une égale facilité. On aimait à chanter ses airs, à l’entendre toucher du piano ou de l’orgue. La ville entière d’Agen applaudit à un motet qu’on l’avait