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ments. On les trouvait à côté des portraits de Descartes, de François Viète, de Newton, de Galilée et d’Euler.

Laplace avait toujours eu l’habitude d’une nourriture très-légère : il en diminua de plus en plus et excessivement la quantité. Sa vue très-délicate exigeait des précautions continuelles ; il parvint à la conserver sans aucune altération. Ces soins de lui-même n’ont jamais eu qu’un seul but, celui de réserver tout son temps et toutes ses forces pour les travaux de l’esprit. Il a vécu pour les sciences : les sciences ont rendu sa mémoire éternelle.

Il avait contracté l’habitude d’une excessive contention d’esprit, si nuisible à la santé, si nécessaire aux études profondes ; et cependant il n’éprouva quelque affaiblissement sensible que dans les deux dernières années.

Au commencement de la maladie à laquelle il a succombé, on remarqua avec effroi un instant de délire. Les sciences l’occupaient encore. Il parlait avec une ardeur inaccoutumée du mouvement des astres, et ensuite d’une expérience de physique qu’il disait être capitale, annonçant aux personnes qu’il croyait présentes qu’il irait bientôt entretenir l’Académie de ces questions. Ses forces l’abandonnèrent de plus en plus. Son médecin[1], qui méritait toute sa confiance par des talents supérieurs et par des soins que l’amitié seule peut inspirer, veillait auprès de son lit. M. Bouvard, son collaborateur et son ami, ne l’a pas quitté un seul instant.

Entouré d’une famille chérie, sous les yeux d’une épouse dont la tendresse l’’avait aidé à supporter les peines

  1. M. Magendie.