Page:Mémoires de Suzon soeur de D. B., 1778.djvu/159

Cette page n’a pas encore été corrigée
155
DE SUZON.


mort ſubite m’enleva la veille du jour qu’il avoit deſtiné pour me faire une rente viagere de mille écus. Ses parens, qui ne ſoupiroient qu’après ſa ſucceſſion, me donnerent à peine le temps d’emporter mes effets, & me renvoyerent avec le peu que j’avois.

J’appris heureuſement, dans ce temps-là, qu’un Baladin de deſſus le rempart avoit beſoin d’une Actrice pour repréſenter dans les Pantomimes. Quoique je ne connuſſe point le théâtre, je payai d’effronterie : j’eus la hardieſſe de me préſenter, & j’eus le bonheur d’être reçue. Huit jours après, je débutai à l’entiere ſatisfaction du Directeur de cette troupe, qui ne s’y connoît pas, & avec les applaudiſſemens d’un public qui n’a pas le ſens commun. Car on ſait que ce ſpectacle n’eſt ordinairement rempli que de petits-maîtres, de laquais & de catins.

Des Sauteurs Eſpagnols qui repréſentoient alors ſur le même théâtre leurs tours de force, m’offrirent de partager leur chambre avec

G 6