Page:Mémoires de Suzon soeur de D. B., 1778.djvu/112

Cette page n’a pas encore été corrigée
108
MÉMOIRES


grin étoit ſi grand & me paroiſſoit ſi ſincere, que toute inconſolable que j’étois, je fus obligée de chercher à le conſoler. Qu’allez-vous devenir, me diſoit-il, ſi je ſuis forcé de vous quitter ; je retournerai, lui dis-je, dans ma famille, & je vous aſſure que vos bienfaits ne ſortiront jamais de ma mémoire.

Comme mon amant s’attendoit que nous ſerions forcés de nous ſéparer, il avoit pris ſur lui tout l’argent qu’il poſſédoit & me l’offrit avec beaucoup de généroſité. Je fis des difficultés pour l’accepter, & je n’en voulus prendre que quatre louis, qui me parurent une ſomme ſuffiſante pour faire ma route. Je retins ce jour là même ma place au coche, & je partis le ſur-lendemain.

Les perſonnes qui étoient dans la voiture publique étoient d’état bien différent. Il y avoit des Moines, des Abbés, & des Officiers, & j’étois ſeule de femme. Sur la route on agita différentes queſtions. Tous les ſujets étoient traités très-ſuperficiellement, com-