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lorsque tout-à-coup il revint sur ses pas : — et l’orchestration est-elle faite ?… — Ah ! mon Dieu, lui dis-je, je n’y avais pas songé ! Ce sera là le plus difficile !… — Certainement, ajouta-t-il et vous ne pourrez jamais y parvenir. — Il le faudra pourtant bien, repris-je ; il y aura nombre considérable de fautes d’harmonie, sans nul doute, mais je ferai, je vous le promets bien, ma partition d’orchestre comme j’ai fait celle de piano. — Allons, allons, courage, mon enfant, j’y crois presque, à présent.

Une partition d’orchestre, me dis-je, qu’est-ce donc ? Jamais une seule ne m’était passée par les mains. Lorsque j’allais une fois par hasard entendre un opéra, je voyais bien des cahiers distribués à chaque musicien ; il y avait à peu près une trentaine d’instruments. Alors j’eux la naïveté de croire (j’en ris encore en y pensant) qu’il fallait, pour faire une partition d’orchestre, écrire sur chacun de ces cahiers, séparément, et je les rangeai sur le parquet du salon, qui était fort grand, et là je me mis en devoir d’essayer à composer mon instrumentation. Hélas ! je ne pouvais y parvenir ; j’en étais désespérée, quand tout-à-coup je m’écriai : Oh ! que je suis donc simple !… cette manière