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et m’appela gueuse et coquine. M. le juge de paix la réprimanda de nouveau, lui disant de se retirer sur-le-champ.

La salle où se passait cette scène était fort grande ; Mme Lormeau alla vers la porte, mais se ravisant tout à coup, elle revint sur ses pas, et là, faisant une révérence bien moqueuse jusqu’à terre, elle s’écrie : « Oh ! le beau juge de paix que vous faites, vous connaissez, ma foi, bien votre métier. » Elle se préparait de nouveau à se retirer, lorsque M. le juge de paix, revenant de sa stupéfaction, appela à haute voix un huissier qui, entrant aussitôt, la repoussa rudement. « Qu’on s’empare de cette femme, dit le juge de paix : insulter un juge dans ses fonctions ! ça ne se passera pas ainsi. » Elle devint alors pâle et tremblante ! J’étais vengée !… Je me retirai : l’on m’entoura dans la salle d’attente, afin d’apprendre ce qui venait de se passer. Je dis : « C’est une femme de la société qui vient d’insulter M. le juge de paix. » Tout le monde, naturellement, était curieux de la voir sortir ; et, je le dis franchement, je me mis du nombre. Elle ne tarda guère à paraître, et me lança (comme si j’étais coupable de sa conduite) un regard furieux.