Page:Mémoires artistiques de Mlle Péan de La Roche-Jagu, écrits par elle-même.pdf/131

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
– 122 –

placer. La salle était comble, et l’on a refusé, m’at-on dit, plus de trois mille personnes ; cette fois là, mon succès fut plus grand encore, car la cantate eut l’honneur du bis. — Je pouvais donc espérer, non seulement vendre mon œuvre ; mais bien encore, que mon nom obtiendrait quelque retentissement. L’auteur des paroles, dont le caractère véhément ne m’était point alors assez connu, me fit perdre la bonne veine qui semblait s’ouvrir pour mon avenir. — Voyant le succès que cette deuxième audition obtint, ne voilà-t-il pas qu’elle s’ingéra d’aller faire une scène à ces braves soldats, qui faisaient de leur mieux, et au moment où ils sortaient, elle les apostropha d’une manière très peu gracieuse, en leur disant devant tout le monde : « Vous avez très-mal chanté aujourd’hui, vous ne mettez pas assez d’entrain et de vigueur. Je chanterais mieux que vous. — Eh bien ! Madame, reprit le chef de musique (fort choqué d’une pareille sortie), chantez désormais, comme vous le voudrez. »

Je ne me trouvais point là, malheureusement, au moment où cette inconvenante conduite eut lieu, et lorsque je l’appris, j’en fus désespérée, pensant avec justesse, que c’était une affaire per-