Page:Mélanges de littérature française du moyen âge.djvu/34

Cette page n’a pas encore été corrigée

30 LITTERATURE FRANÇAISE AU MOYEN AGE

soit conservée dans ce document, quelle qu'en soit hi date. — Bien que M. Suchier ne soutienne plus que les Normands ont eu dans le développement de l'épopée française une part pré- pondérante, il leur en attribue encore une qui me paraît exces- sive. Je ne sais à quoi il reconnaît dans la Chanson de Roland « une légère teinte anglo-normande » en dehors de ce qui appartient au copiste du manuscrit d'Oxford (p. 26). « Le poème de Baligant glorifie les Normands et a été sûrement com- posé en Normandie «(p. 26). Si M. Suchier a pour cette asser-' tion des arguments linguistiques, je les attends ; quant à l'ar- gument interne, il ne signifie rien : les Normands sont énu- mérés, avec une épithète louangeuse comme en reçoivent la plupart des autres, après les Francs, les Bavarois et les Alle- mands ; mais la vraie prédilection du poète, comme de Char- lemagne, est pour celsdc France, qui les règnes conquièrent. J'ignore également sur quoi M. Suchier se fonde (p. 29 et p. 55) pour dire que la chanson d'Aspreinont nous est parvenue « dans une rédaction normande de la première moitié du xii" siècle ». — • Ce qui est dit de Fierahras (p. 29) me paraît peu exact : il y a bien une « introduction indépendante et postérieure » (la Destruc- tion de Ronie\ mais il en a existé une forme plus ancienne qui faisait corps avec la suite ; il n'est pas juste de dire, au moins pour la première partie de ce poème, qu'il « montre une faible puissance épique » : le combat d'Olivier et de Fierabras est un des plus beaux morceaux de notre vieille poésie. — M. Suchier place vers 1 100 la date du Pèlerinage de Charleniagne (p. 21, 24); il a sans doute ses raisons pour ne pas admettre celles que j'ai données en faveur d'une date plus reculée d'une quarantaine d'années ; il me semble qu'il ne rend pas tout à fait justice à cette œuvre si originale, la seule d'une époque aussi reculée que nous possédions sous sa forme première (ce qui tient sans doute à ce qu'elle n'a rien de traditionnel et est l'œuvre d'un seul poète). Je le trouve aussi un peu froid pour Huon de Bor- deaux (p. 31), qui me paraît dans son genre, avec son style lâché mais naturel et amusant, un des produits les plus char- mants et les plus durables de notre ancienne poésie narrative. La geste de Garin. — Sur le célèbre fragment, conservé à la Haie, d'un poème latin, composé au plus tard au x"' siècle, où figurent, à côté de Charlemagne, dans une lutte contre les Sar-

�� �