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AMADAS ET IDOINE 335

d'un chagrin d'amour, motif qui a, comme on sait, fait une brillante fortune, puisque des romans en prose de la Table Ronde, qui l'avaient emprunté au Chevalier au lion et peut- être aussi à notre poème, il a passé k VOrlando furioso, dont il est devenu le motif dominant '.

Le remaniement continental d'une œuvre poétique anglo- normande n'est pas un fait isolé, bien qu'il n'ait pas jusqu'à présent été souvent constaté. On possède une copie faite en Picardie du Saint Brendan de Beneeit composé en 1 1 2 5 pour la reine d'Angleterre Aélis, dans laquelle on s'est surtout attaché à fliire disparaître une particularité de la versification de l'au- teur ^ Mais le parallèle le plus frappant nous est offert par la Fie de sainte Catherine, écrite en Angleterre au xii siècle par la sœur Clémence de Barking^ et dont il existe une rédaction française où les traits anglo-normands de l'original ont été effacés avec autant de soin et par les mêmes procédés que l'ont été ceux d'Aniadas et Idoine dans notre copie artésienne ■+. Il serait intéressant de retrouver d'autres cas semblables et de prouver ainsi que, si la littérature anglo-normande a large- ment subi, comme il était naturel, l'influence de la litté-

��ne paraît pas connaître ce poète : il cite de nombreux romans, parmi lesquels ne tîgure aucun de ceux de Chrétien.

1. Voyez rénumération des sources de l'Arioste pour la folie de Roland dans le beau livre de M. P. Rajna, Le Fonti dell Ortando furioso, p. 342 ss., où d'ailleurs il n'est pas fait mention de notre poème. C'est à tort qu'on a supposé qu'il pouvait y avoir un lien entre Amadas et Amadis, où le héros, d'ailleurs, ne devient pas fou à proprement parler.

2. Imprimée par M. Auracher dans le t. II delà Zeitschrift fur romanische Philologie, pp. 438-458.

3. Clémence elle-même nous apprend qu'elle s'est bornée à « amender » une vie plus ancienne, sans doute également anglo-normande.

4. M. U. Jarnik a imprimé le poème de Clémence et le remaniement l'un en face de l'autre, en les accompagnant d'un commentaire très étendu, malheureusement écrit en tchèque : Dvë Verse starofraiicouikè legendy sv. Kateriiié (PrUguQ, 1894).

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