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322 LE ROMAN

cycle de Raso ', ait pu exister indépendamment avant d'être soudée au conte de la feinte morte.

Le Salomon qui figure dans le récit est certainement le ISalomon biblique \ Cela indique pour le conte byzantin une piovenance juive, bien qu'on n'ait pas retrouvé ce thème dans la riche littérature légendaire groupée autour du fils de David \ Mais quelle est l'origine du conte juif lui-même ? M. Vesse- lofsky et M. Vogt s'accordent à la chercher dans la Jégende tal- mudique où l'on voit le démon Asmodée, fait prisonnier par Salomon +, s'emparer de son anneau, doué, comme on sait, de vertus extraordinaires, prendre ainsi la forme de Salomon et régner à sa place jusqu'à ce que celui-ci rentre en possession de

��1. Sans vouloir entrer dans l'étude de ce cycle, je ferai remarquer qu'une histoire assez semblable est racontée d'une femme de Milet, qui, enlevée par un Gaulois et rejointe par son mari qui vient la racheter, l'accueille bien, mais conseille au Gaulois de le tuer et de garder son or ; sur quoi le Gaulois, indi- gné, l'immole elle-même et dit la vérité au mari. Ce conte, conservé par Parthénios de Nicée (Erotici Scriptores, éd. Hercher, t. I, p. 10-12; Cougn}', Extraits des auteurs grecs concernant la géographie et Vhistoire des Gaules, t. II, p. 502 et suiv.), a été mis en vers par Ronsard (voir Revue d'his- toire littéraire de la France, t. I, p. 185). — Je note ici en passant qu'une forme très particulière du thème de Raso vient d'être mise au jour, — dans

■une rédaction latine du xif siècle, — par M. A. Schônbach {Die Geschichte des Rudolf von Schliïsselherg] : je dirai prochainement aux lecteurs du Journal des Savants un mot de cette intéressante publication [/. des S., 1903, p. 122. ]

2. Le nom de Pharaon l'indique assez. Chrétien, Elle de Saint-Gilles, les Sept Sages, le Blasnie des Femmes attribuent évidemment l'histoire au grand Salomon.

5. M. Burdach (Archiv fi'ir das Studium der neuercn Sprachen, t. CVIII, p. 131) se demande si l'origine de notre légende ne serait pas dans une corne à boire que l'on montrait dès le \m^ siècle à Jérusalem, à côté de l'anneau de Salomon : on la donnait, il est vrai, pour la corne qui avait contenu le baume avec lequel on sacrait les rois de Jérusalem ; mais on aurait pu en faire un cor ayant appartenu à Salomon et tirer de là la seconde partie de la légende. C'est fort peu probable.

4. Cette légende de la capture d' Asmodée par Salomon a passé de bonne heure en Occident, où Asmodée a été remplacé par Merlin. Elle existe indé- pendamment de la suite dont il va être parlé.

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