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LA LEGENDE DE PEPIN « LE BREE » 211

des recherches, mais qui n'ont pas d'intérêt pour l'histoire de Pépin lui-même : ce conte, originairement mythique, n'est rap- porté que par hasard au père de Charlemagne. Il est probable qu'il s'est attaché à lui à la suite de l'histoire de la jeunesse de Charlemagne lui-même et de ses luttes contre ses frères Heldri et Rainfroi : on a voulu expliquer comment le père de Charles avait des fils à demi légitimes % et on a mis sur son compte l'histoire du roi qui, trompé par une machination criminelle, avait vécu pendant des années avec une femme qu'il prenait pour la sienne. C'est sans doute parce que le premier auteur de cette combinaison savait que l'épouse du roi Pépin s'appelait Bertrade ou Bertc qu'il a donné ce nom à l'héroïne de son récit ^. Il n'y a donc pas lieu de se demander si le véritable héros de l'histoire n'est pas Pépin « le Moyen » et non son petit-lils, ce qu'on serait tenté de croire en considérant que les aventures prêtées par nos poèmes au jeune Charlemagne appartenaient plus anciennement à Charles Martel et n'ont de fondement que dans son histoire > ; mais le nom de Berte, qui est commun <i toutes les versions, semble bien prouver que le conte n'a été introduit dans l'épopée carolingienne que pour être appliqué au père de Charlemagne et quand celui-ci ayait déjà tout à fait remplacé son grand-père dans sa lutte contre Heldri (Helpri) et Rainfroi. Il est vrai qu'on pourrait soutenir que le nom de Berte, auquel on a cru trouver un sens mythique, était essentiel au conte avant son incorporation à notre épopée, et que c'est ce nom

��PhiL, XVI, 2IO. M. Muret avait annoncé, il y a sept ans, sur cette légende un travail étendu qu'il ne nous a pas encore donné.

1 . Dans nos poèmes ils sont qualifiés tout simplement de bâtards ; mais le fait que Pépin avait cru les engendrer avec sa femme légitime leur donne naturellement une position à part. Au reste, dans la réalité, c'était Charles (Martel) qui était bâtard, et les plus anciens poèmes ne le dissimulaient sans doute pas.

2. Je n'entre pas dans l'examen de tout ce qui a été dit sur la véritable ori- gine de la femme de Pépin ; on sait aujourd'hui avec certitude qu'elle était la tille du comte de Laon Herbert.

5. Voy. G. Paris, Hist. poét. de CJhvk)iiaç;He, p. 438 ; Rajna, Origiiii dclV epopea Jrancese, p. 199; Koiiiiniia, XIII, 609.

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