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ÉLIE DE SAINT-GILLES 11"

trouvait réduit à la dernière extrémité. Nulle part d'ailleurs, dans Aioiil, il ne s'agit de Saint-Gilles, et la suture est aussi grossière qu'apparente. Elle ne choqua pourtant pas les contem- porains. Le chroniqueur Aubri de Trois-Fontaines, qui écrivait vers 1240 en Champagne, et qui, on le sait, a inséré dans son texte, comme de l'histoire, le résumé de nombreuses chansons de geste, nous dit, en parlant de la famille de Guillaume d'Orange : De iina sorore Gnilklmi JuJianus de Provincia gcuiiit Heliam et sororcni ejus Olivam, qui Helias mnlta contra Sana- ceiios gessil teiiipore Mûcbahrci, et de sorore Ludovici genuit Aiol, de qiio canitur a iiuiltis. Il connaissait donc déjà la chanson d'Elie avec le dénouement qu'elle offre dans le seul manuscrit qui nous l'ait conservé. Ce manuscrit, comme celui qu'avait exécuté ou fait exécuter le remanieur, donne, à cause même de ce dénouement, la chanson d'Elie pour introduction à celle d'AiouJ, et cette contamination a eu des conséquences jusqu'à nos jours : on a formé d'Elie et d'Aioiil un petit cycle, tout factice, qu'on a appelé le cycle de Saint-Gilles, et les mêmes éditeurs, l'un Français et l'autre Allemand, ont imprimé les deux poèmes, M. Raynaud séparément, M. Fôrster ensemble. En réalité, ces deux poèmes n'ont rien à faire l'un avec l'autre.

La modification, par un remanieur du commencement du xiir' siècle, du dénouement d'Elie de Saint-Gilles n'est pas, il s'en faut, la seule altération que ce poème ait subie dans le cours des âges ; l'histoire des différentes formes qu'il a revêtues pose quelques curieux problèmes d'histoire littéraire. Nous en possédons une version norvégienne, faite pour le roi Hakon V (12 17- 1263) par l'abbé Robert, auquel ce prince, ami de la poésie française, ht, comme on sait, exécuter plusieurs traduc- tions du même genre. Cette version a été publiée par M. Kôl- bing, et une traduction française, faite sur la traduction alle- mande de ce savant, est jointe à l'édition de M. Raynaud. Dans le plus ancien manuscrit VElissaga n'est pas terminée ; le récit s'arrête au moment où EHe et Rosamonde, réfugiés dans une tour où va les assiéger la masse des Sarrazins, délibèrent sur ce qu'ils peuvent faire. « Mais, dit le traducteur norvégien, comment Elle sortit de tous ces embarras, et comment il revint en France, avec Rosamonde, cela n'est pas écrit dans ce livre. L'abbé Robert a traduit, et le roi Hakon, tîls du roi Hakon, a

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