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RIENZI.

au moins je n’ai pas commis le péché de Saül : l’Amalécite ne sera point sauvé ! »

Pendant que Rienzi prenait un repos court, troublé, agité, et que Nina veillait sur lui, dans une insomnie inquiète, tout en larmes, accablée de pressentiments sombres et terribles, l’accusateur était plus heureux que le juge. Les dernières pensées qui traversaient l’esprit juvénile d’Angelo Villani, avant d’être enveloppé dans les bras du sommeil, étaient pleines de sérénité et d’espérance. Il n’éprouvait pas même un remords honorable de ce qu’il avait trompé la confiance d’autrui : il sentait seulement que son dessein avait réussi, qu’il avait bien rempli sa mission. Les paroles reconnaissantes de Rienzi résonnaient à son oreille, et des espérances de fortune et de pouvoir, sous la protection du sénateur romain, le berçaient doucement dans des rêves couleur de rose.

Cependant il y avait à peine deux heures qu’il dormait, quand il fut éveillé par un domestique du palais, à peine éveillé lui-même.

« Excusez, messire Villani, lui dit-il ; mais il y a en bas un messager envoyé par la bonne sœur Ursule ; il vous prie de courir tout de suite au couvent ; elle est malade à mourir, et elle a des communications à vous faire, qui demandent votre présence immédiale. »

Angelo, dont la sensibilité inquiète au sujet de sa naissance était toujours excitée par des espérances vagues, mais ambitieuses, se leva à la hâte, s’habilla, descendit trouver le messager, et se dirigea vers le couvent. Dans la cour du Capitole, tout près de l’escalier du Lion, on entendait déjà le bruit des ouvriers, et en regardant en arrière, Villani aperçut l’échafaud, tendu de noir, reposant comme un sombre nuage dans la lumière grisâtre de la première aurore. Au même instant, la cloche du Capitole tinta tristement. Un saisissement subit traversa son cœur. Il pressa le pas ; quoiqu’il fût encore de bien