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RIENZI.

Pandulfo di Guido avait deux fois harangué la populace, non pas en faveur du sénateur, mais pour exprimer d’artificieux regrets des pertes que causait au commerce de Rome l’absence de ses nobles les plus opulents.

« Alors, il m’a abandonné, se disait Rienzi. Qu’il prenne garde à lui ! »

Les nouvelles contenues dans la dépêche suivante le touchaient de plus près. Walter de Montréal était ouvertement arrivé à Rome. Le bandit avide et sans loi, dont les rapines remplissaient du butin de son brigandage toutes les banques de l’Europe, dont la Grande Compagnie était comme l’armée d’un roi, dont l’ambition, vaste, profonde, sans scrupules, lui était si bien connue, dont les frères étaient dans son camp, suspects d’une trahison trop manifeste…, Walter de Montréal était à Rome !

Le sénateur, à ce nouveau danger, resta frappé d’horreur ; puis il se dit en serrant les dents comme si elles étaient comprimées dans un étau :

« Tigre sauvage, te voilà dans la tanière du lion ! » Puis, après une nouvelle pause, il s’écria : « Fais seulement une fausse démarche, Walter de Montréal, et toutes les mains de fer de la Grande Compagnie ne te sauveront point de l’abîme ! Mais que faire ? Revenir à Rome ? les plans de Montréal sont encore secrets, je n’ai aucune accusation à formuler contre lui. Sur quel prétexte pourrais-je lever le siége avec honneur ? Quitter Palestrina, c’est donner la victoire aux barons. Abandonner Adrien, c’est déshonorer ma cause : et pourtant, éloigné de Rome, chaque heure couve quelque trahison et quelque nouveau péril. Pandulfo, Albornoz, Montréal, ils sont tous à travailler contre moi. Si j’avais un espion adroit et fidèle !… ah ! l’idée est bonne : Villani ! Holà, Angelo Villani ! »

Le jeune chambellan parut.

« Je crois, dit Rienzi, t’avoir souvent entendu dire que tu es orphelin ?