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RIENZI.

et la Grande Compagnie entre dans Rome ; mais sans leur concours, je crois que, si vous me tenez parole, nous pouvons faire réussir notre dessein.

— En attendant, Palestrina est assiégée par vos frères ! dit Stefanello avec amertume.

— N’ayez pas peur, je leur ai donné l’ordre de tuer le temps devant ses murs. Ne voyez-vous pas que ce siége même, infructueux comme il le sera si bon me semble, fait perdre à Rienzi beaucoup de sa renommée au dehors et de sa popularité à Rome ?

— Sire chevalier, dit Luca di Savelli, vous parlez en homme versé dans la profonde politique de notre époque ; et en tenant compte de toutes les circonstances qui nous menacent, votre proposition me paraît opportune et raisonnable. D’un côté vous vous chargez de nous rétablir nous et les autres barons de Rome, et de l’autre vous livrez Rienzi à l’Escalier du Lion…

— Non pas, non pas ! répliqua vivement Montréal… Je veux bien consentir soit à restreindre et à paralyser son autorité, de manière à en faire une marionnette entre nos mains, une vaine ombre de pouvoir ; ou, si son humeur orgueilleuse se trémousse dans sa cage, je peux le lâcher encore pour qu’il aille prendre sa volée dans les forêts d’Allemagne. L’emprisonner ou le bannir, bien. Mais le détruire, non ; à moins (ajouta Montréal après quelques moments de silence) que le destin ne nous y force absolument. La puissance peut à la rigueur se passer de victimes ; mais pour la consolider, des victimes peuvent être parfois nécessaires.

— Je comprends vos subtilités, dit Luca di Savelli avec son sourire glacial, et je suis satisfait. Une fois les barons rétablis, une fois nos garnisons rentrées dans nos palais, je veux bien courir la chance de la longévité du sénateur. Vous promettez de nous rendre ce service ?

— Je le promets.