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RIENZI.

cain l’avait reçu froidement. Ses mercenaires étrangers, son titre de sénateur étaient chose que l’artisan ne pouvait lui pardonner. Avec sa rude franchise, il l’avait dit à Rienzi.

« Quant au dernier de ces reproches, répondit d’un ton affable le tribun, les noms ne changent point les caractères. Si jamais j’oublie que le mandataire du pontife est le gardien de son troupeau, abandonnez-moi. Quant aux mercenaires qui font ma force, que je voie seulement cinq cents Romains engagés par serment à se tenir armés jour et nuit pour la défense de Rome, et je congédie les Allemands. »

Cecco del Vecchio ne fut point radouci ; honnête homme, mais sans éducation, intraitable et mécontent par nature, il sentait qu’il n’était plus nécessaire au sénateur, et c’est ce qui blessait son orgueil. Tout étrange que cela peut paraître, le maussade ouvrier gardait aussi à Rienzi une rancune secrète de ce qu’il ne l’avait pas vu et honoré d’un regard dans la foule innombrable, le jour de son entrée triomphale. Telles sont les futiles offenses qui créent souvent aux grands de terribles dangers.

Les artisans continuaient à tenir leurs assemblées, et la voix de Cecco del Vecchio ne se faisait pas faute d’annoncer de sinistres pressentiments. Mais ce qui blessait Rienzi bien plus cruellement que de se voir aliéner les cours de tous les autres, c’était le trouble, le changement qu’il trouvait dans les manières de son ancien ami et commensal Pandulfo di Guido. Ce citoyen populaire lui ayant fait défaut parmi ceux qui chaque jour lui présentaient leurs hommages au Capitole, Rienzi l’avait mandé, et s’était efforcé en vain de raviver leur intimité d’autrefois. Pandulfo lui témoigna beaucoup de respect, mais toute la condescendance du sénateur ne put surmonter sa réserve et sa contrainte étudiées. Le fait est que Pandulfo avait appris à former des projets ambitieux pour