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RIENZI.

Oui, ma foi ! il m’a fait un signe de tête, et là-dessus, avec son manteau écarlate et son bonnet rouge, il a regardé en face l’arrogant Espagnol avec un orgueil qui valait bien le sien. « Monseigneur, lui a-t-il dit, bien que vous ne m’accordiez ni armes ni argent pour braver les dangers de la route et esquiver les embûches des barons, je suis prêt à partir. Sa Sainteté m’a fait sénateur de Rome ; selon la coutume, je viens vous prier, monseigneur, de confirmer sur-le-champ cette nomination. Je voudrais que vous eussiez pu voir comme le fier Espagnol est resté stupéfait, comme il a rougi, comme il a fait la moue, mais il s’est contenté de se mordre les lèvres presque sans rien dire.

— Et il a confirmé la promotion de Rienzi comme sénateur ?

— Oui, et il l’a béni avant son départ.

— Sénateur ! dit en croisant les bras un géant robuste à cheveux gris ; je n’aime pas qu’il prenne un titre qui a été porté par un patricien. J’ai bien peur que ce nouveau titre ne lui fasse oublier l’ancien.

— Fi ! Cecco del Vecchio, vous êtes un vieux grognard s’écria un marchand de draps, dont le trafic se trouvait bien du cérémonial de ces fêtes. Fi donc ! pour ma part, je crois que le titre de sénateur est moins nouveau dans son genre que celui de tribun. J’espère que cela va nous amener des réjouissances : voilà assez longtemps que Rome s’ennuie. Un mauvais temps pour le commerce, je vous en réponds ! »

L’artisan grimaca un sourire de dédain. Il était du nombre de ceux qui établissaient une distinction entre la classe moyenne et la classe ouvrière, et un marchand lui était aussi odieux qu’un noble. « La journée s’avance, dit le petit homme, il ne peut pas tarder à venir. La dame du sénateur et toute sa suite sont allées à sa rencontre, il y a déjà deux heures. »