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RIENZI.

— J’accepte ce témoignage de votre courtoisie d’aussi grand cœur qu’il m’est offert, noble Montréal. Dieu veuille que dans la suite je puisse vous le rendre ! En attendant permettez-moi de vous dire, sauf respect, que si j’avais appris la présence de la Grande Compagnie dans cette direction, j’aurais modifié mon itinéraire. J’avais ouï dire que vos armes s’étaient tournées ( et à mon avis le but n’en était que plus noble) contre Malatesta, le tyran de Rimini.

— C’est vrai, j’ai commencé par là. Il était mon ennemi, il est mon tributaire. Nous l’avons vaincu. Il nous a payé le prix de sa liberté. Nous avons marché par Asciano sur Sienne. Pour seize mille florins nous avons épargné cette cité ; et aujourd’hui nous voilà suspendus comme un foudre sur Florence, qui a osé envoyer ses chétifs secours à la défense de Rimini. Nos marches sont rapides, et nous venons d’asseoir notre camp dans cette plaine.

— On dit que la Grande Compagnie est l’alliée d’Albornoz, et que son général est en secret le guerrier de l’Église. Est-ce vrai ?

— Oui, Albornoz et moi, nous nous entendons ensemble, répartit d’un ton insouciant Montréal, et d’autant plus que nous avons un ennemi commun, que nous avons tous deux fait serment d’écraser, en la personne de Visconti, archevêque de Milan.

— Visconti ! Le plus puissant des princes Italiens. Je sais qu’il a justement encouru la colère de l’Église, et je puis facilement comprendre qu’Innocent ait révoqué le pardon que les intrigues de l’archevêque achetèrent de Clément VI. Mais je ne vois pas aussi bien pourquoi Montréal provoquerait un ennemi aussi cruel, aussi terrible. »

Montréal répondit avec un sourire amer : « Ne connaissez-vous pas la vaste ambition de Visconti ? Par le Saint-Sépulcre, c’est précisément l’ennemi que mon âme brû-