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RIENZI.

bien changé Rienzi. Ses membres avaient acquis cet embonpoint qui n’était plus la vigueur compacte de l’âge viril dans sa fleur ; la pâleur sereine de ses joues était couverte d’un rouge étique et trompeur. Même dans ses études présentes, toutes sérieuses qu’elles paraissaient, toute naturelle qu’était la lecture à un esprit enthousiaste jusqu’au fanatisme, ses yeux ne pouvaient plus, comme jadis, s’attacher avec constance à la page ouverte devant lui. Le charme avait disparu. De temps à autre il reprenait ses mouvements inquiets, tressaillait, puis se rasseyait, en murmurant des exclamations interrompues, comme un homme en proie à un rêve agité. À chaque instant son regard impatient se tournait en haut, en bas, autour de lui, et dans ses grands yeux perçants errait une flamme étrange, qui aurait pénétré le spectateur d’une terreur vague et inexplicable.

Angelo avait raconté exactement les dernières aventures de Rienzi après sa chute. D’abord il s’était retiré avec Nina et Angelo à Naples, où il avait trouvé une faveur courte et trompeuse auprès de Louis, roi de Hongrie ; ce souverain d’un caractère dur mais honorable avait refusé de livrer son hôte illustre sur la demande de Clément, mais il avait franchement déclaré à Rienzi son impuissance de lui donner asile plus longtemps. Tout en conservant des communications secrètes avec ses partisans de Rome, le fugitif chercha alors un abri chez les ermites séquestrés dans les retraites solitaires du mont Maiella ; là, il avait passé une année entière dans la solitude et la méditation, sauf le temps consacré à son voyage de Florence, aller et retour. Profitant du jubilé à Rome, il avait alors, déguisé en pèlerin, traversé les vallées et les montagnes encore richement ornées des tristes ruines de la Rome antique ; et rentrant dans la ville, il se laissa emporter par son âme inquiète et ambitieuse à de nouvelles mais infructueuses conspirations ! Excommunié une seconde fois par